jeudi 18 septembre 2008

Si j'avais une brouette #1

« Putain ! »
« Qu’est-ce t’as foutu encore Jo ? »
« Putain mais viens voir, dépêche-toi ! »
« Ah merde, encore la tronçonneuse ? »
« Ouais j’ose pas regarder là, je crois que je me suis pas raté, tu peux enlever ma chemise pour moi ? »
« Je t’avais bien dis de pas boire avant de te servir de la tronçonneuse… »
« Putain Irène j’ai pas bu, enlève moi cette saloperie de chemise, je perds du sang là, fais un noeud autour de mon bras avec la chemise. »
« Ok, mais va falloir que tu songes à espacer tes apéros mon vieux, j’ai du mal à te l’enlever ta chemise »
« Et t’as pas intérêt à la déchirer, c’est que j’y tiens moi. »
« Tu es en train de mourir, me fais pas chier avec ta chemise.»
« Mourir ? »
« Bah oui, j’espère qu’après le cri que t’as poussé tu vas pas juste t’être cassé un ongle. »
« Vérifie ce que j’ai. »
« Bah t’as rien mon vieux, t’as une griffure. »
« Tu mens. »
« Je te dis que t’as rien, ouvre les yeux grand nigaud, tu verras par toi-même. »
« Oh j’y vois plus rien, y’a comme un voile blanc devant mes yeux. »
« J’ai pas le temps de jouer là. »
« Mais Irène, je déconne pas, tu me prends jamais au sérieux. »
« C’est la quatrième fois cette semaine que tu meurs à cause de la tronçonneuse, excuse moi mon pauvre Jo’ de plus trop avoir l’air étonnée. »
« Tu vois tu serais bien contente si je mourrais ! »
« T’as pas d’autres sottises à dire là ? Parce que si c’est le cas tu les notes, et tu me les diras au souper parce que là je suis pas prête d’avoir fini mon ouvrage. »
« Ton ouvrage, ton ouvrage ! »
« Oui mon ouvrage ! Et c’est pas tes bouts de bois morts qui font nous faire vivre, je te signale. »
« Tu crois peut-être que ce sont tes fleurs qui payent l’électricité ? »
« C’est pas des fleurs, des compositions florales plutôt. »
« Appelle ça comme tu veux, joue avec les mots alors que je crève… »
« Tu m’épuises en tout cas, je te laisse. »
Irène laisse Jo, elle retourne dans le pré voisin ramasser des herbes diverses. Irène tient une boutique qu’elle a appelé « Planterie ». Elle y vend des bouquets, des compositions florales, des herbiers déjà tout faits, des livres sur l’horticulture. Depuis quelques temps elle vend même des tisanes de sa composition. C’est pour ça qu’elle doit ramasser ces herbes dans les prés de son frère Jo, chez qui elle vit depuis la mort
de son mari, il y a dix ans. La boutique lui appartient mais elle ne rencontre pratiquement pas les clients, et c’est mieux pour tout le monde. C’est surtout mieux pour Catherine, la fille d’Irène, qui se destinait à une carrière dans la Police mais qui n’a jamais réussi à l’intégrer. Elle est la vendeuse, elle conseille même les clients de temps en temps. Quand sa maman est de bonne humeur, elle lui laisse même choisir les posters publicitaires qui seront sur la porte vitrée à l’entrée du magasin. Marc, le mari de Catherine, s’occupe, lui, du côté administratif de l’affaire. Le couple vit à l’étage, au dessus du magasin, parce que c’est plus pratique. Un jour, Catherine a quand même réussi à être en retard de 10 minutes, mais ce n’est pas trop grave parce que personne ne vient acheter un livre sur les pissenlits à 9h08.

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